Le numéro d'avril d'AMC est paru
- Gilles Davoine, rédacteur en chef
- Actualités
- Pritzker
Au sommaire du numéro d'AMC qui vient de paraître (n°295-avril 2021) et disponible en format numérique: un événement sur l'enseignement de l'architecture et les débats qui agitent les enseignants des Ensa, un dossier sur l'habitat pour séniors, des détails "cloisons mobiles" et une matériauthèque consacrée aux innovations d'artisans. Mais aussi les réalisations du mois: l'extension du musée des beaux-arts de Zurich par David Chipperfield, 14 logements locatifs par l'agence Mars à Paris, un pôle municipal à Saint-Savournin (Bouches-du-Rhône) par Oh!Som et Lionel Cesarole, 20 logements sociaux à Paris pour Remingtonstyle, et un centre d'art contemporain par Lis & Daneau à Ugine (Savoie). En référence, l'œuvre déconstructiviste de Gottfried Böhm.
Edito
L'attribution du prix Pritzker à Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal pourrait bien - espérons-le - marquer un tournant dans l'architecture française, par sa résonance avec les temps présents. Si cette désignation, qui assure une notoriété internationale à ses récipiendaires, fait quasiment l'unanimité chez les architectes, ce sont bien les maîtres d'ouvrage et l'ensemble du monde de la construction, avec son arsenal réglementaire, qu'elle devrait faire réfléchir. Car bien cynique serait le commanditaire qui se désintéresserait d'architectes proposant, pour un même budget, de donner à l'habitant davantage d'espace, davantage de lumière, davantage de confort, et de lui laisser la main sur son lieu de vie. Le cynisme ou le conformisme - sinon la paresse intellectuelle - étant choses relativement courantes dans la construction, voilà trente ans que nos valeureux chevaliers Lacaton-Vassal - souvent accompagnés par leur compère Frédéric Druot - luttent, comme Don Quichotte contre les moulins à vent, armés de leurs seules convictions, contre les habitudes de l'immobilier, l'inertie administrative ou les lobbies industriels. Il est vrai que leur cheval de bataille est depuis longtemps à rebrousse-poil des pratiques usuelles, refusant de se soumettre aux contraintes techniques ou normatives, n'hésitant pas à remettre en cause l'économie d'un projet ou à reformuler le programme : au-delà de construire ce qu'il est convenu d'appeler, en langage technocratique, un « logement », il s'agit pour eux de renouer avec le goût de « l'habiter », en rétablissant les notions d'hospitalité, de bien-être, et même de poésie. « Habiter, pour l'individu, pour le groupe, c'est s'approprier quelque chose, disait Henri Lefèvre en 1970. Non pas en avoir la propriété mais en faire son œuvre, y mettre son empreinte, la façonner, la modeler. » Nul doute que c'est à cette grande ambition - souvent oubliée dans la production courante - que prétend l'architecture de Lacaton-Vassal, en utilisant ses propres armes, au premier chef desquelles une envie jamais démentie, une générosité infinie et une obstination imperturbable.
Gilles Davoine, rédacteur en chef
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N°295
datant de avril 2021