Le numéro de mars d'AMC est paru
Au sommaire du numéro d'AMC qui vient de paraître (n°267-mars 2018): un événement sur la réhabilitation des tours Nuages d'Emile Aillaud à Nanterre, un dossier sur l'apprentissage par l'expérimentation à l'échelle 1, des détails sur les bardages en bois et une matériauthèque consacrée aux métaux et composites. Mais aussi les réalisations du mois: l'église Anastasis par Alvaro Siza à Saint-Jacques-de-la-Lande, un centre de loisirs et une salle de danse par OECO à Cabestany, l'extension du musée-franco-américain de Blérancourt par les Ateliers Lion, des logements sociaux par Guillaume Ramillien à Fourchambault, ainsi que le nouvel escalier du musée national d'Art moderne à Paris par Studiolada et Png. En référence, Claude Guislain (1929-2011), pionnier de l'habitat participatif en France.
Edito
Fission nucléaire
La conception d’une habitation est le métier de base de l’architecte. «Ce qui se passe dans un logement est plus complexe que la fission nucléaire car moins maîtrisable. L’architecte est justement là pour rendre possible ce qui n’est pas maîtrisable», déclarait Frédéric Borel le 16 février, lors d’une matinée consacrée au logement à la Cité de l’architecture. Et Anne Lacaton de renchérir: «L’habiter ne concerne pas seulement les quatre murs de la cellule du logement, mais tout ce qu’il y a autour: jardins d’hiver, loggias, locaux pour le linge ou les vélos… tout ce qui peut donner plus de liberté, de confort, de plaisir et même, de luxe.» Habiter un lieu, cette expérience humaine fondamentale, devrait offrir à tous des conditions d’épanouissement, d’apaisement et de ressourcement. On en est loin.
Car le rôle de l’architecte dans le logement se restreint. Souvent évincé du chantier, il est en passe de devenir un décorateur de façades, son statut d’expert de «l’habiter» lui étant dénié. Quelques centaines d’entre eux –dont plusieurs lauréats de l’Equerre d‘argent ou de grand prix d’architecture et d’urbanisme– ont signé une tribune dans Le Monde du 14 février pour alerter le gouvernement. Ils pointent notamment «la diminution progressive des surfaces [-15% en moyenne en dix ans pour un trois-pièces], les cuisines en second jour, les espaces additionnels passés à la trappe, les matériaux médiocres entraînant vices cachés, malfaçons et donc coûts supplémentaires d’entretien et de réparation».
Le projet de loi Evolution du logement et aménagement numérique (Elan), qui sera présenté fin mars en Conseil des ministres, fait craindre une aggravation de la situation. Déjà, les promoteurs privés construisent, en Vefa, plus de 50% des logements sociaux et les organismes HLM peuvent, sous certaines conditions, déroger au concours d’architecture. La loi en préparation, sous prétexte de simplification et d’accélération de la production du logement social –et pour compenser la réduction des APL– pourrait aller plus loin, en remettant en cause la loi MOP de 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique. En abandonnant carrément le principe du concours, ce «moment d’intelligence collective» –comme le dit le nouveau président de l’Ordre, Denis Dessus– qui permet, en amont, de régler bien des problèmes. A vouloir sacrifier le temps de la réflexion et de la conception, on renonce à la qualité. Vouloir faire «plus vite et moins cher», c’est rarement faire mieux; mais plus souvent, faire pire.
Gilles Davoine, rédacteur en chef