Le numéro de septembre d'AMC est paru
Au sommaire du numéro d'AMC qui vient de paraître (n°271-septembre 2018): une enquête sur les data centers, un dossier sur le permis d'expérimenter, des détails sur les façades thermiques et une matériauthèque consacrée aux Bassins à flot, à Bordeaux. Mais aussi les réalisations du mois: un centre de soins psychiatriques à Metz par Richter, un musée à Lodève par Projectiles, un théâtre à Cachan par Ateliers O-S, une résidence pour adultes handicapés à Rennes par Bourbouze&Graindorge, ainsi qu'une boutique à Marseille par Rémy Marciano. En référence, l'œuvre de Rogelio Salmona en Colombie (1927-2007).
Edito
Intelligente?
A vouloir suivre de près les évolutions technologiques, l’urbanisme n’en sort pas toujours grandi. Au début du XXe siècle, les efforts pour introduire dans les villes le rationalisme des processus industriels, en séparant soigneusement les fonctions urbaines, a abouti à la charte d’Athènes, avec des résultats pour le moins discutables. Plus tard, dans les années 1970 et 1980, le tout-automobile et le développement du commerce de grande distribution ont dessiné des périphéries urbaines étalées et mornes. En ce début de XXIe siècle, la révolution numérique s’installe silencieusement dans le territoire, avec ses besoins croissants en data centers, immenses hangars pour le stockage des données qui viennent coloniser des zones rurales ou des immeubles en centre-ville (lire p.14).
Mais la présence des acteurs du numérique dans l’espace physique ne s’arrête pas là. Le 31 juillet dernier, Google a reçu l’agrément définitif des autorités publiques de Toronto (le Waterfront Toronto board) pour construire un quartier sur 800 hectares, en lieu et place de friches industrielles, sur les rives du lac Ontario. Un quartier truffé de capteurs et de caméras qui compileront des millions de données ayant trait à l’activité des habitants, afin de répondre à tous leurs besoins et d’améliorer leur vie quotidienne : sécurité, transport, santé, eau, énergie… Pour sa part, le géant du numérique Cisco a installé son laboratoire grandeur nature de l’internet des objets dans la pionnière des smart cities, Songdo, créée en 2003 en Corée du Sud. Le concept de ville «intelligente», qui se diffuse progressivement dans les villes existantes, est aujourd’hui en passe d’être récupéré par les Google, Apple et autres Facebook, qui détiennent le monopole de la collecte et du stockage des données personnelles, embarquées dans nos téléphones et ordinateurs. Et qui entendent bien les valoriser en proposant leurs services aux autorités locales, prétendant résoudre les problèmes de violence, de congestion automobile, de pollution, et même, de conception urbaine. Au risque d’éliminer d’emblée tout débat public. Et, en guise d’architecture, de ne considérer que celle des réseaux numériques.
Gilles Davoine, rédacteur en chef