Matière grise : les livres de Léa Mosconi et Henri Bony, pour construire une architecture bestiale

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Parce que les défis sociaux et environnementaux contemporains sont immenses, qu'ils mettent à plats les modèles architecturaux et les références intellectuelles, la rédaction d'AMC interroge les architectes, les enseignants et les chercheurs sur leurs livres pour penser le passé, le présent et le futur. Une "matière grise" à mettre en partage, pour fabriquer une nouvelle culture commune. Les architectes et enseignants Léa Mosconi et Henri Bony, commissaires de l'exposition "Paris Animal" présentée au Pavillon de l'Arsenal jusqu'en septembre 2023, exposent leur bibliographie pour penser l'altérité et l'animalité en architecture.

Bruno Latour, "Eschatologie et morale", article issu d’une conférence donnée à l’Institut Catholique de Paris en 2008

En mobilisant la figure du monstre, par le biais de Frankenstein, Bruno Latour convoque une figure de l’altérité qui nous offre des pistes pour penser la manière dont cohabiter avec l’autre. Cet autre qui nous est différent (le monstre, l’animal), qui est régit par d’autres règles que les nôtres, qui a un corps différent du nôtre. Il met en lumière l’importance de la relation que l’on peut instaurer avec celui ou celle que l’on ne comprend pas, pour réussir à partager un même territoire tout en ayant des mondes différents.

Manuel Bello-Marcano (dir), Marianne Celka (dir), Mathias Rollot (dir), dossier "L’architecture à l’épreuve de l’animal", Cahiers de la recherche architecturale urbaine et paysagère, numéro 14, 2022

Face au constat de la présence foisonnante des recherches sur l’animal dans différentes disciplines, de la géographie à l’histoire en passant par la philosophie, Manuel Bello Marcano, Marianne Celka et Mathias Rollot proposent de consacrer un numéro des Cahiers de la recherche architecturale urbaine et paysagère à cette question pour saisir et retracer la place de l’animal, et de l’animalité, dans la recherche en architecture. Plusieurs axes structurent le numéro, le premier questionne la manière dont certains architectes prennent en considération l’animal, un deuxième interroge la place et le rôle des bêtes dans l’aménagement du territoire et un troisième propose de saisir les imaginaires associés aux animaux dans l’architecture. Neuf articles scientifiques (dont ceux de Dominique Rouillard, Mathieu Mercuriali, Delphine Lewandowski, Julie Cardi, etc.) qui, ensemble, participent à ancrer l’animal dans la recherche en architecture.

Vinciane Despret, Le chez soi des animaux, Acte Sud, 2007

“Ou plutôt, corrigent les chats, en riant d’un rire de chat, les humains croient vivre chez eux alors qu’en fait ils vivent chez nous, (personne de relève, tout le monde sait que les chats se pensent chez eux partout)”. Vinciane Despret part d’une question, celle du chez soi des bêtes et nous emmène dans une traversée des territoires et des lieux des animaux, par le biais d’une discussion entre escargots, loups, chouettes, et autres saumons, discussion qui courre tout le long de l’ouvrage. C’est un double décentrement qui s’opère, nous amenant à la fois à appréhender depuis d’autres regards les caractéristiques du territoire ; nous conduisant en parallèle à observer autrement la question domestique, depuis ce déplacement engendré par les voix des bêtes. Et si penser la question de l’habité depuis les faucons et les guêpes potières nous ouvrait quelques pistes ?

Gilles Deleuze, Kafka pour une littérature mineure, Editions de minuit, 1975

Gilles Deleuze nous emmène le long des couloirs de la bureaucratie de Kafka, en suivant cette figure de l'animal qui ouvre des lignes de fuite créatrices. "Que d'invention, (...) sobre invention syntaxique, pour écrire comme un chien". Ce texte nous pousse dans une analyse froidement spatiale des relations que l’on peut, ou pas, instaurer avec les corps chauds et animés des animaux.

Jean-Christophe Bailly, Le Versant animal, Bayard, 2007

Le Versant animal s’ouvre sur la rencontre furtive de l’auteur avec un chevreuil qui surgit d’une lisière sur la route. Cette « grâce frémissante » de la bête dans le territoire quotidien humain, rend visibles selon Bailly « des passages, des souverainetés furtives, des occasions, des fuites, des rencontres » possibles entre l’humain et l’animal ; celles-ci pouvant nous bouleverser, voire nous faire bifurquer. C’est de ce temps suspendu de la collision entre deux mondes, le monde humain et celui des bêtes, qu’il s’agit dans l’ouvrage. Mais c’est aussi une plongée dans la foule des vivants, dans ce qu’ils ont de sombre, de joyeux, de complexe, d’épais, d’hétérogène et de vivifiant.

F. Malher, O. Disson, C. Gloria, M. Leick-Jonard et M. Zucca, Atlas des Oiseaux Nicheurs du Grand Paris 2015-2018, LPO-IdF, Paris, 2020

Cet ouvrage précis et dense permet de prendre la mesure de la présence des oiseaux nicheurs dans le territoire grand parisien et d’éveiller l’œil naturaliste du lecteur et de la lectrice. Le description des espèces en présence et de leur milieu y est précise, ce qui participe à construire une vision décentrée du territoire de la capitale. A travers différents indices, l’ouvrage propose à nous autres architectes, de saisir les caractéristiques architecturales et urbaines permettant de favoriser, ou non, la présence animale dans la ville.

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