Regard de photographe: Laurent Malone dans la "jungle" de Calais

Chaque semaine, AMC donne la parole à un photographe pour commenter l'une de ses prises de vues. Invité de cette série: Laurent Malone.

Laurent Malone traverse les villes d’Europe, d’Asie, des Etats-Unis, observant les signes de mutation, d’appropriation des espaces urbains, jusqu'à constituer des séries de documents photographiques chaque fois sensibles et incarnés. Dans son atelier, à Marseille, il garde précieusement les dessins signés de Tony Garnier, transmis par son grand-père assistant et collaborateur de l’architecte. Peut-être à l’origine de son goût du détail et de son regard sur la ville. Ce collectionneur en mouvement, plusieurs fois exposé, aime raconter la jungle urbaine. La mission photographique commencée en février 2015 à Calais, avec l’association Perou  (Pôle d’exploration des ressources humaines), les étudiants en architecture des écoles de Paris-Malaquais et de Paris Belleville, avait comme point de départ le relevé méthodique, l’inventaire, de tous les dispositifs constructifs visibles sur le campement. Les tentes conçues pour être provisoires évoluaient dans le temps. "Habiter le campement" dans la durée faisait naître une ville. "Il y avait une économie, des églises, des mosquées, des jardins potagers, raconte Laurent Malone. Le camp s’opposait à la ville existante tout en amenant de la vie. Très structurés, les aménagements sont devenus anarchiques quand on est passé de 500 à 10000 migrants. Les quelques "squats" du début ont été déplacés, par le gouvernement, à 7 km, à proximité du centre Jules-Ferry, qui a polarisé le développement de la "jungle". Personne n’imaginait ce que représentait un tel rassemblement. Après cinq mois d’arrêt forcé, j’ai repris ce travail en mai 2016. Mon regard avait changé pour se cristalliser sur la mémoire. Je suis passé du scientifique au collecteur d’histoires que j’adresse à ceux qui sont restés".

www.laurentmalone.com

https://reinventercalais.org