Ajap 2020, l'expo des lauréats - Derniers jours à la Cité

En 2020, le ministère de la Culture a désigné 15 équipes d'architectes et quatre de paysagistes, lauréates des Albums des jeunes architectes et paysagistes (Ajap). Une chance pour ces concepteurs de moins de 35 ans désireux d'accéder à une commande de maîtrise d'œuvre d'envergure, quand on sait que le manque de références ne rassure pas les commanditaires sur le marché de l'architecture. Principal dispositif de promotion de la jeune création menée par l'État tous les deux ans, le label "Ajap" constitue pour ses lauréats une solide distinction, censée faciliter un peu le remplissage de leur carnet de commande. Par la large visibilité médiatique qu’offre le palmarès (exposition itinérante et ouvrage collectif pour chaque session), mais surtout grâce au carnet d’adresses d'élus, de maîtres d’ouvrage, d'institutions, qui s'engagent à les soutenir au sein d'un "club des parrains". Pour les observateurs, dépouiller chaque promotion d'Ajap est l'occasion de prendre le pouls du monde de l'architecture. C'est une coupe offerte sur la profession. Quelles sont les préoccupations de ces jeunes concepteurs ? Quelles sont leurs aspirations et leurs méthodes ? Quels savoir-faire de l'architecte questionnent-ils ? Bref, les Ajap sont l'occasion de comprendre le métier qui vient, et l'architecture de demain.

Écologie holistique

Cyrille Véran, commissaire de l'exposition présentée à la Cité de l'architecture jusqu'au 14 novembre 2021, le souligne : "de la figure autoritaire et surplombante de l’architecte, un peu réductrice mais pointée par certains lauréats, il n'est pas question" dans cette édition du palmarès des Ajap. Confirmant un mouvement profond de renouvellement des manières d'être architecte, engagé depuis plusieurs années par leur prédécesseurs, les lauréats 2020 des Ajap valorisent la sobriété des actions et la cohérence entre engagements citoyens et professionnels. Dans le sens des préoccupations générationnelles pour l'environnement, l'économie des ressources et la transformation de l'existant, ils développent "une culture écologique dans sa version holistique, qui enjoint à de nouvelles manières de faire qui portent attention et soin aux territoires et aux espaces du quotidien", décrit Cyrille Véran. Certains décryptent les conditions du projet sous un angle très large et pluridisciplinaire (géopolitique, économique, etc.), d'autres s’impliquent dans les processus de sa fabrication, à la rencontre des acteurs, décideurs autant qu'artisans. Tous s'indignent de la fabrique de paysages génériques et préfèrent se nourrir de "leur épaisseur culturelle et géographique, de leurs constructions vernaculaires et de leurs spécificités locales" pour faire projet. En somme, ils forment une génération attentive au déjà-là, humain et non-humain, bâti et paysager. Une question demeure face à ce palmarès aux ambitions admirables : où sont les femmes, très peu nombreuses parmi les lauréats ? "Cette pensée collective invitant à la transformation des consciences saurait-elle se dispenser de la présence des femmes ?", s'interroge Cyrille Véran. Et au-delà, comment encourager la présence des femmes dans les Ajap, indispensable outil de structuration du marché de la commande, pour ne pas continuer à accentuer les disparités liées au genre qui y règnent ?

• "Albums des jeunes architectes et paysagistes 2020", exposition
• Jusqu'au 14 novembre 2021
• Cité de l'architecture et du patrimoine, Paris
• www.citedelarchitecture.fr