ÉQUERRE D'ARGENT 2009 / NOMINÉ – LIPSKY ET ROLLET - CAMPUS UNIVERSITAIRE
- 26/10/2015 à 07h00
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Dans le cadre du plan Université 2000 mené par le ministère de l’Education nationale, les architectes Florence Lipsky et Pascal Rollet viennent de livrer à Troyes le campus des comtes de Champagne.
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Marquant un retour de l’université dans la ville, l’aménagement des 10 973 m2 en plein cœur de Troyes redonne vie à un site historique en déshérence, enclavé et à la jonction stratégique de trois quartiers hétérogènes. De plus, grâce à sa mise en forme éclatée et au partage de plusieurs équipements, le campus favorise une connexion avec la ville et évite un fonctionnement centré sur les seuls étudiants. Ce complexe accueille un programme mixte. Il comprend un restaurant universitaire, des logements avec des espaces partagés, un gymnase, deux salles de sport, un parking et l’administration du Crous qui assure la gestion de l’ensemble.
Lipsky et Rollet connaissent bien les programmes d’enseignement éprouvés à travers les réalisations des grands ateliers de l’Isle d’Abeau 2002, de l’école supérieure d’ingénieur à Valence 1997, ou encore de la bibliothèque universitaire des sciences à Orléans 2005 (1).
A Troyes, revendiquant la création d’un pôle de confort, ils ont opté pour la fragmentation d’éléments rassemblés autour de vides, une figure relevant d’une conception typiquement orientale. Par ailleurs le cahier des charges de l’étude de définition lancée en 2002 préconisait l’utilisation du bois et un retour de l’eau autrefois présente sur ce site d’une ancienne darse. Cette dernière est reconstituée sous la forme d’une promenade linéaire piétonne alliant l’eau et le végétal tout en s’adaptant à une nouvelle topographie des lieux. La création d’un belvédère permet de glisser 160 places de parking sous la pente d’accès, d’introduire des accroches visuelles et de faire varier le traitement des abords du campus. L’entrée du site et les vues sur la cathédrale sont ainsi mises en scène.
Le programme est réparti dans quatre bâtiments organisés autour de deux parvis, l’un en partie haute sur dalle, l’autre en partie basse face à l’espace animé de restauration, les deux places publiques étant reliées par deux passerelles. Les logements occupent deux bâtiments de tailles différentes mais ils répondent au même principe : un socle de béton massif avec les fonctions communautaires telles que le restaurant et l’administration du Crous. Au-dessus, deux niveaux d’habitations faits de modules de bois préfabriqués sont disposés selon un plan en U. Cette configuration dégage un espace central qui accueille les coursives de desserte des logements et deux salles de réunions.
Les chambres sont des boîtes en épicéa constituées de panneaux contrecollés dont les planches sont posées dans des directions croisées. Il s’agit du principe dit KLH lequel permet de nouvelles possibilités de transmission des charges. D’une superficie de 16 m2, les chambres sont doublement orientées, les réserves pour les fenêtres étant dès le départ découpées dans les panneaux grâce au calibrage informatique. La taille de ces derniers fabriqués en Autriche – 12 m x 3 m – a été déterminée par les possibilités de transport en camion. Assemblées sur place, les boîtes sont ensuite empilées sur un squelette également de bois.
Afin de préserver son aspect et de faciliter l’entretien les architectes ont revêtu toutes les façades d’une couverture de polycarbonate transparent. Cet habillage imperméable est porté par une structure de bois dont la trame régulière évoque le colombage classique des constructions troyennes. La mise au point de ce système de façade – son étanchéité, sa résistance aux chocs et son comportement thermique – a d’ailleurs nécessité de nombreuses recherches afin d’obtenir la certification atex auprès du CSTB car le polycarbonate ainsi utilisé ne correspond à aucune norme connue pour le moment. Pour les parois extérieures des espaces collectifs et les toitures les architectes ont opté pour un bois reconstitué de type Sylvadec de couleur plus sombre. La coloration de l’ensemble et le rythme des trames provoquent un effet immédiat de fusion avec le site historique tout en affichant une singularité propre.
Dans le même esprit d’inventivité, les deux autres constructions abritent respectivement dans deux cubes : un gymnase multisport pour le premier puis deux salles pour les arts martiaux et la danse pour le second volume, plus petit. Affichant la différence de programmes par rapport aux logements, ces constructions sont recouvertes de panneaux transparents en polycarbonate de type Everlite dans l’épaisseur desquels sont glissés des brise-soleil métalliques.
Enfin, concernant le 1 % artistique réglementaire – sélectionné par la Drac, la ville et la Communauté d’agglomération troyenne assurant la maîtrise d’ouvrage – les architectes avaient émis le souhait d’une intervention ayant valeur d’usage, susceptible de renforcer le confort du campus comme des éléments de signalétique ou de mobilier. Au final, le plasticien Veit Stratmann a dessiné des bancs mobiles comme des manèges dont l’assiette et l’assise sont formées de pastilles en plastique rouge vif.
Inauguré le 8 juin dernier par Valérie Pécresse, ministre de l’Enseignement supérieur et par François Baroin, maire de la ville de Troyes, le campus représente une opération symbolique d’autant plus que le terrain d’accueil du campus aurait pu être l’objet de spéculations foncières importantes. Alors que Valérie Pécresse annonçait un travail de mise en réseau des universités et la récupération possible d’anciennes casernes militaires, il semblerait que se mettent en place d’inédits partenariats entre institutions publiques et investisseurs privés. Il reste à espérer que le campus des comtes de Champagne ne soit pas que le faire-valoir politique d’un jour et que suivront d’autres réalisations de la même envergure.
(1) Ce projet a reçu le prix de l'Equerre d'argent 2005.
Visitez le site des architectes : www.lipsky-rollet.com
- Lieu : Troyes (10).
- Maîtrise d’ouvrage : Communauté de l’agglomération troyenne ; maîtrise d’ouvrage déléguée, Icade G3a.
- Maîtrise d'oeuvre : Florence Lipsky et Pascal Rollet ; suivi de chantier : Laurent Thierry et Anna Flak ; Atelier Frédérique Garnier, paysagiste ; SFICA, bet ; Gaujard Technologie, construction bois ; Mdetc, économie ; Veit Stratmann, 1 % artistique.
- Surface : territoire aménagé, 10 973 m2 ; surface construite : 4 386 m2 Shon.
- Coût : 16 233 700 € HT ; Coût des logements étudiants : 1 347 € /m2 Shon.
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