La magie des échecs

Le parisien Romain Morandi a créé sa galerie comme on monte un projet de cœur, porté par l’élan passionné du chercheur. Son exposition sur les échecs concentrée sur des objets du XXe siècle inaugure le lieu. Il a réuni un grand ensemble de pièces signées, du styliste Haute couture Pierre Cardin à l’architecte Zaha Hadid, incluant l’artiste Vasarely et quelques anonymes. Un livre est édité en parallèle, pour ne rien perdre de ces découvertes.

Daniel Libeskind, Jeu d'échecs City, Swarovski 2016, Chess Exposition, Galerie Romain Morandi - © Studio mierswa kluska
photo n° 1/12
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Les Echecs, dont les règles et l’organisation des pièces se sont figées seulement à La Renaissance, sont l’objet de savoir-faire et de réflexions extrêmement variés. Romain Morandi, qui a lancé il y a un an sa galerie éponyme, s’intéresse depuis près de quinze ans à cette discipline particulière, qui manipule tous les enjeux de ce monde semble-t-il. D’octobre à novembre 2022, 32 jeux d’échecs d’artistes et de designers de 1890 à nos jours y étaient présentés, accompagnés d'une sélection de mobilier.

Une représentation du Monde

Parmi les notions qu’aborde le jeu d'échecs - la stratégie guerrière sur un terrain symbolique parfaitement circonscrit, avec ses points de fuites, pour des durées indéfinie ou accélérée (les parties éclair dites "Blitz") ; l’alternance puisque le camp est redécidé à chaque partie ; l’ordre social avec une hiérarchie et des codes implicites -, c'est un univers tout entier qui s'exprime à petite échelle, des dimensions du plateau et à celles des pièces. La prise en main selon le matériau est encore un paramètre, où des figures toujours identiques ne se répètent jamais : à travers des styles radicalement distincts, tout est ouvert à de nouvelles interprétations.

Le jeu d’échecs signifie

Pratiquer les échecs est aussi une forme d’abstraction, qui offre une expérience fondamentale spatio-temporelle. L’inspiration déborde, autant pour des joueurs que des non-praticiens, jusqu’à la table expressément dédiée à cette activité. Ainsi Yoko Ono a-t-elle conçu un plateau intégré dans sa table ronde en bois laqué blanc, complétée des pièces avec chaises assorties (1966). Le grand nombre de pièces présentées réunies des œuvres d’artistes, d’architectes, de designers, de styliste de haute couture, d'architecte d’intérieur et d'anonymes du XXe siècle, manifeste d’un vivier de création hors norme. Ainsi, en 1934, Joseph Hazrtwig et Joost Schmidt sont alliés autour du Bauhaus pour une option nomade qui combine, en bois de bouleau, le jeu pour le premier et boîte réalisée par le second. En 1962, René-Jean Caillette évoque la conquête spatiale dans un bois laqué. En 1968, Pierre Cardin appose sa signature dans le roi de son set tout bronze (Evolution) qui reprend son logo, avant que le principe ne contamine les modes du marketing. En 1971, Franco Rocco déploie son armée de laiton, doré ou chromé selon le joueur, dont chaque élément s’emboîte dans un raffinement exemplaire pour former un cube. En 1972, Gianfranco Frattino explore un mariage entre argent et acrylique. Et en 1979, Victor Vasarely interroge le réel avec une carte métaphysique et ses effets optiques fabriqués par des pièces en plexiglas.

 

En 2001, c'est Michael Grave qui réalise sa version du jeu en résine sur plateau bois. Deux agences stars prennent ensuite le parti d’une microarchitecture stylisée en 2016 : Daniel Libeskind, mais il démultiplie étonnamment les matières, mêlant cristal, acier, béton, marbre et laiton (City, Atelier Swarowski) ; Zaha Hadid mise quand à elle sur la résine pour Fields of Towers.

Au-delà de l’exposition, un livre

Cette quête des représentations du jeu d'échecs ne quitte Romain Morandi. Afin de poursuivre l’aventure après l'exposition, une arrière-salle est aménagée dans sa galerie qui servira de micro-espace permanent d’exposition, de découverte. Un livre a également été publié aux Editions Norma en parallèle ; au total près de 600 pièces ont été identifiées.

 

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