Renzo Piano et le palais de justice de Paris - Entretien

Le 16 avril, la première audience s'est tenue dans le nouveau tribunal de grande instance de Paris, conçu par l’agence RPBW. Situé en bordure du périphérique nord, le bâtiment est une tour en verre de 160 m de haut – la première construite dans la capitale depuis la tour Montparnasse, en 1973 – constituée de quatre volumes superposés, de taille décroissante, accueillant en toiture des jardins suspendus. Quelques jours avant cette mise en service, Renzo Piano nous accordait un entretien, en revenant sur cette aventure de huit années, récompensée par l’Equerre d’argent 2017.

Renzo Piano, architecte - © Stefano_Goldberg
photo n° 1/4
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"L'architecture, c'est le mélange des besoins et des désirs, des nécessités et rêves."

 

 
Vous avez construit des programmes très variés, mais c’est votre premier palais de justice. Comment avez-vous procédé ? Etes-vous allé visiter de telles opérations à travers le monde ?
 
C’est effectivement ce que l’on fait habituellement. Mais dans ce cas, nous nous sommes abstenus. Pas par paresse ! mais parce qu’on croulait sous les informations, de la part de l’Etablissement public du palais de justice de Paris [EPPJP], dirigé à l’époque par Jean-Pierre Weiss, de la part des magistrats et de la part de Bouygues, puisque l’opération se faisait en partenariat public-privé [PPP]. Cela constituait tellement de sources d’information qu’il n’était pas nécessaire d’aller en chercher ailleurs. En plus, il fallait aller très vite : on avait cinq mois pour rendre la première esquisse, puis un an pour peaufiner le projet. Il faut dire aussi que dans ce type de contrat, tout est extrêmement figé. Le programme, les surfaces… ne sont pas du tout négociables. L’Etat achète ce qui figure dans le programme et Bouygues doit fournir ce qui est attendu, et rien d’autre. En revanche, nous avons assidûment fréquenté l’ancien palais de justice, sur l’île de la Cité, avec sa salle des pas perdus tout en pierre, assez belle, mais plutôt obscure et intimidante. Et il nous a fallu vraiment beaucoup de temps pour comprendre le fonctionnement de cette institution. Alors la dernière des choses à faire, c’était d’aller faire le tour du monde pour aller voir ce qui se fait ailleurs !
 
Le programme comportait-il une réflexion sur ce que doit être un palais de justice au XXI siècle, et éventuellement, la symbolique qu’il doit véhiculer ?
 
La symbolique est un thème qui a été assez présent, pendant le projet, notamment avec les magistrats. Sauf que nous, nous sommes tellement vaccinés contre la rhétorique que la symbolique nous fait toujours un peu peur ! Cette discussion est devenue peu à peu une discussion sur la transparence, la légèreté et la lumière. Bien sûr, personne n’a été assez fou pour penser qu’un bâtiment transparent rendrait une justice meilleure ! Néanmoins, je pense qu’un lieu dans lequel il y a une grande luminosité, une grande transparence, peut faire sentir le monde meilleur. L’architecture transmet une sensation, comme un film ou un roman. D’ailleurs, plutôt que de symbolique, il faudrait parler de sémantique. La sémantique, c’est l’art d’exprimer des choses avec des formes, avec des espaces. C’est le but de l’architecture d’exprimer une émotion. Quand on fait une salle de concerts par exemple, bien sûr, la qualité de l’acoustique compte, mais aussi d’autres choses, comme la configuration de l’espace, les formes, les matériaux, et c’est cela qui fera que tout le monde partagera un plaisir, celui d’être ensemble.
 
 

Retrouvez la suite de l'entretien avec Renzo Piano dans AMC n°268-avril 2018.

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